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Tumbling et chute libre d'Adam Parer !

Tiré de ozreport.com, novembre 2009.
Traduit par 
Debbie Leusink et Nicolas Vuille

Je suis sorti de l'hôpital il y a 3 jours et ai essayé d'écrire quelque chose sur l'accident la nuit dernière. C'est un incident effrayant, mais les résultats n'ont rien d'autre que des conséquences positives pour nous tous. Nous pouvons survivre à un déploiement du parachute à la vitesse de chute maxi après la séparation de notre deltaplane. Mieux vaut éviter un tel événement, mais si cela arrive, il est possible de s'en sortir. Je suis très chanceux et extrêmement reconnaissant d'être encore ici. J'espère que ce qui suit répondra à vos interrogations.

Cela s'est passé lors de la 2e task de Gulgong Classic 2009 et tout comme la veille, les rafales de vent et les turbulences dans la zone de remorquage étaient de modérés à lourds. Il faisait environ 30-35 degrés Celsius au sol et les conditions semblaient stables même si la météo avait prédit une instabilité. A cause des conditions fortes, des câbles de remorquage ont lâché et il a fallu travailler dur pour mettre tout le monde en l'air. La tâche était de 209 km, au nord, jusqu'à la piste d'atterro à Manille.

J’ai été remorqué hors de la piste d'atterrissage vers 13h30, derrière Pete Marhiene. Au cours du premier thermique, j’ai remarqué plusieurs couches d'inversion légères.  J’ai dérivé avec le vent et ai retrouvé Chris Jones, Phil Schroder, Oliver Barthelmes et Dave Mai. Nous avons plafonné à 6500 pieds avant de nous diriger au nord-ouest  en vent de travers. (...) afin de sortir du vent de face sur la ligne de la manche.



Chris était en avance sur 200m et après cinq kilomètres de glisse, je l'ai regardé effectuer deux tours complets dans ce qui ressemblait à un thermique bien établi. Avant que je ne sois arrivé, il en était déjà ressorti et était à la recherche d'un autre thermique. Cette situation était typique pour les conditions du jour. Des bulles de très courte durée, des turbulences légères à modérées et en général un sentiment d'air stable (...) Loin au nord, il y avait de beaux nuages qui remplissaient le ciel le long de la chaîne de Liverpool et au-delà. Nous avions besoin d'arriver là-bas, mais pour l'instant, nous continuions de chasser pour un noyau.

Tandis que Chris, Oli, Phil et Dave recherchaient contre le vent, je me suis dirigé vent arrière sur une centaine de mètres et ai remarqué que l'air paraissait vraiment meilleur à cet endroit. Toujours cahoteux et stable, mais au moins c'était plus "soutenu" que ce à quoi je m'attendais et je pensais pouvoir gagner un peu de hauteur en quelques tours avant que ce thermique se finisse aussi (...)
Bientôt, je sentis une pompe plus en avant et à gauche, alors j'ai commencé un virage à faible angle dans cette direction et le variomètre a commencé à chanter à environ 1,5 m/s. L'overdrive était pratiquement détendu, il y avait seulement la longueur d'un bras. Je volais à 50 km/h avec une position de barre de contrôle plus rapide que la vitesse de finesse max.

Après avoir effectué un quart de tour, les "G" ont commencé à s'alléger et le nez a commencé à basculer en avant vers le bas. Je m'attendais à un claquement de câbles et à un retour au vol normal, mais cela ne s'est pas produit. Les "G" tombèrent à zéro et le nez a continué de piquer (...) Je me suis bien tenu à la barre de contrôle et j'ai tenté de la tirer pour conserver ma position de vol, mais cela n'était pas possible. Les "G" devinrent négatifs et le nez continua sa route. J'ai continué à m'accrocher à la barre de contrôle et ai tenté de garder le torse le plus près possible de la barre, mais le harnais au niveau de mes pieds se dirigeait inlassablement vers mon intrados et tout mon corps finit par suivre le même mouvement. Le basculement du nez continuait et, à ce moment, je perdis le contact avec ma barre de contrôle...

A ce moment j'étais comme sans poids dans l'air. Le deltaplane est parti en tumbling et je me suis fait retourner avec l'aile sans la toucher quand elle passa en-dessous de moi à l'envers. Au moment où l’aile s’est remise en position de vol normal avec beaucoup de bruit,  la sangle s'est tendue et pour une fraction de seconde, je pensais que l'aile allait se stabiliser mais elle avait plus que suffisamment d'élan pour entrer dans le deuxième tumbling. A nouveau, je ne me souviens pas avoir frappé une partie du deltaplane lorsque j'ai passé par-dessus pour la seconde fois. (...) et à nouveau je tombe et tends la sangle avec un fort claquement. Cette fois-ci, la tension a duré pendant une période beaucoup plus courte. A nouveau je me suis senti sans poids comme si je tombais tout droit sur plusieurs mètres avant de commencer une rotation dans le plan horizontal (comme une graine de sycomore). Nous pensons que le câble a lâché à ce moment et que les ailes se sont pliées en deux.

La première vrille s'est arrêtée rapidement, mais je suis entré dans la 2e avec une vitesse beaucoup plus grande. J'ai tenté d'extraire mon parachute de secours, mais la vitesse de rotation de l'aile était si forte que mes bras étaient "centrifugés". Impossible d'amener une main près de la poignée! Je réalisais bien que j'étais dans une sale position et que ma vie dépendait de l'extraction de mon secours. Malgré mes insistances, mes bras restaient éloignés du harnais.

La suite est quelque chose que je n'aurais jamais pu imaginer: une force développée par ces rotations, une incroyable accélération et une augmentation si rapide des "G"!  J'avais déjà visionné des vidéos de cas similaires lorsqu'un delta casse ses ailes, mais les rotations semblaient atteindre un maxima après quelques tours. Pas dans mon cas. La force "G" a continué à augmenter, ce qui me poussait le sang dans la partie ventrale, l'avant de mon corps. Suite à ça, des hématomes graves se sont produits dans mes yeux.
Après le cinquième ou sixième tour, la charge était tellement forte que je savais que le tout allait lâcher et heureusement cela se produisit avant que je ne subisse des blessures plus graves. Soudain, en une fraction de seconde, la force centrifuge tomba à zéro et je me suis senti comme lancé dans l'espace. Au moins je pouvais bouger mes bras et ma tête. Je dirigeais ma main vers la poignée du parachute...

J'étais conscient de me déplacer horizontalement avec beaucoup de vitesse et pouvait aussi entendre la vitesse qui accélérait très rapidement. J'étais comme un projectile mais rapidement cela s'est transformé en chute libre. J'ai alors réalisé que je m'étais séparé de mon deltaplane. J'ai dirigé ma main droite vers la poignée mais rien ne bougea. Après quelques essais, j'étais convaincu qu'il allait falloir être beaucoup plus persuasif pour sortir le parachute (la plaque dorsale s'étant cassée, l'ouverture du pod était déformée, ce qui empêchait son extraction).

Comme je luttais pour sortir mon secours et que je continuais à me débattre, au bout d'environ 5 secondes, le bruit de l'accélération de l'air atteint son maximum: j'avais atteint la vitesse maximale de chute libre! Un seul bras ne suffisait pas donc j'ai pris la poignée du parachute avec les deux mains. Après encore quelques secondes, j'ai senti que le parachute commençait à sortir. Je l'ai jeté sur le coté puis attendu. Ce qui a suivi a été le choc le plus douloureux et violant de ma vie, comme si j'avais été déchiré en deux. Des douleurs extrêmes remplissaient immédiatement mon corps, le pire étant dans ma poitrine et la partie haute de mon dos. Je savais que j'avais des blessures graves et je pensais tout de suite que mon dos était cassé. J'ai regardé vers le haut pour voir une des plus belles choses: la forme circulaire de mon parachute, ouvert et tout propre. L'écoulement de l'air était maintenant tout calme et la terre ne s'avançait plus vers moi à une vitesse autant élevée. En moins de quinze secondes, je suis tombé de 1400 mètres, le parachute et harnais ont survécu au déploiement, comme moi, mais pas sans blessure… La douleur me faisait savoir que je n'allais pas bien.

C'est à ce moment-là que j'ai pensé à la paralysie et j'avais hâte d’être fixé. J'ai essayé de plier mes doigts et ils fonctionnaient. J’ai pensé avec peur aux jambes et je réussis à les bouger. Un certain soulagement s'est mélangé avec l'inquiétude d'avoir le dos probablement cassé, même si la moelle épinière était encore intacte. J'avais besoin d'atterrir doucement pour protéger ce qui n'était pas encore cassé. J'ai regardé vers le bas et les 600 mètres restants me semblaient arriver très lentement. Je pouvais juste respirer. Il fallait descendre le plus vite possible et trouver de l’aide.

Après une minute de tentative de prendre plus d'air dans mes poumons, j’ai commencé à ne plus voir de couleur; j’étais en train de perdre conscience petit à petit. Le fait d'avoir des blessures fatales m’effrayaient.

A ce moment, mes pensées se sont concentrées sur ma femme qui est décédée au début de cette année. J'espérais qu'on pouvait se rejoindre et l'idée de la revoir me rendait très content pour la première fois en quatre mois. Idem pour mon meilleur ami avec qui j'avais partagé tellement des choses, parti il y a longtemps déjà.  Je n'avais plus mal et j'étais calme. Après quelques instant, j’ai repris conscience en me disant que je n'allais pas mourir, que j'allais survivre, que cela n’était pas encore l'heure pour moi. La tranquillité était perdue et la douleur a ressurgi violemment. J’ai perdu connaissance.
Lorsque j’ai refait surface, j'étais couché sur le dos et je regardais le ciel et les alentours. Soudain, je me suis rendu compte de ce qui venait de m’arriver. Surpris et soulagé, j’ai crié "J'ai survécu!". A ce moment-là, j’ai commencé à être tiré vers l'arrière sur une courte distance. En regardant derrière moi, j’ai vu à nouveau le beau parachute rouge par terre, toujours gonflé. Une autre rafale est passée et a emporté mon parachute un peu plus loin.
 
La douleur était pire que jamais et je devais sortir de mon harnais. J’ai vérifié à nouveau le mouvement de mes bras et jambes et ils semblaient toujours pouvoir bouger. J'ai enlevé les sangles de cuisses et de la taille. Quand j’ai lutté pour enlever la ceinture de poitrine, j’ai entendu un paysan qui avait repéré mon parachute gonflé par terre et qui était venu voir mon état. "Puis-je vous aider?", m’a-til demandé en arrivant vers moi. -"Oui, enlevez-moi cette ceinture et appelez les secours s’il vous plaît".

Lui aussi au eu du mal à enlever la ceinture et j’ai pensé qu'elle était cassée à cause du déploiement brutal. Soudain elle s'ouvrit. Je me suis roulé pour sortir du harnais, me suis levé et ai marché vers l'ombre d’un arbre. Je me suis mis dans la position la moins douloureuse. Je suis resté ainsi pendant 90 minutes jusqu'à l'évacuation.
 
Trois choses que j'ai vues ce jour-là seront des souvenirs à vie. La première, la vue de mon parachute 'High Energy' loin en-dessus de moi, me ramenant doucement vers la terre après le coup le plus violent et douloureux de ma vie. Egalement en reprenant connaissance, une fois couché dans le champ, l’image du grand parachute rouge derrière moi par terre, toujours gonflé comme si il veillait toujours sur moi.
 
La deuxième chose est la vue d'Oli, Dave, Phil et Chris, qui avaient atterri tous près. Je les ai regardé sortir de leurs harnais un par un et je me senti mieux tout de suite. Ils sont restés à coté de moi en silence, mais leurs inquiétudes étaient évidentes. Les secours mirent 45 minutes pour arriver et les pilotes les ont encouragé à se dépêcher. Ils ont tout fait pour me faire emmener le plus vite possible à l'hôpital. A un moment, j'ai entendu Oli supplier les secouristes : "Vous devez envoyer un hélicoptère, vous devez l'envoyer tout de suite". Dave était juste à coté de moi et il transmettait mes réponses, car j'arrivais à peine à parler. Je ne peux pas décrire à quel point leur présence était importante pour moi.

Finalement, l'hélicoptère rouge et jaune de Westpac est arrivée ! L'équipage a travaillé rapidement et une fois dans l'air j’ai réalisé que j'étais en sécurité. Nous nous sommes dirigés vers le « John Hunter Hospital » à Newcastle.
 
Arrivés à l'hôpital, un visage familier m'attendait en vêtements verts : Conrad Loten, également pilote de delta et chef de département d'urgence. Il m’a pris en charge en dirigeant son équipe avec calme, autorité et compétence. Après le CAT scan, Conrad est venu me voir et il m’a annoncé les dégâts : 6 côtes cassées, un poumon fissuré, le sternum cassé et la poitrine cassé en fléau (???!!!). "Et mon dos, il va comment?" lui ai-je demandé. Avec un petit sourire, il m'a assuré que mon dos était en condition parfaite, sans aucun dégât.
 
Conrad m’a tenu au courant de mes progrès ainsi que des traitements durant toute la semaine qui suivait. J'étais effectivement très chanceux de l’avoir comme médecin. Mes copains m’ont visité tous les jours et heureusement j'ai récupéré rapidement pendant cette première semaine. Ma famille est venu avec de la bonne nourriture pour m’éviter le « menu » de l'hôpital. Pour l'instant, le pronostic est incertain, mais il est bien possible que je parvienne à récupérer complètement. Chaque jour je me sens plus fort.
 
Je suis très chanceux d'avoir survécu à cet accident. Plusieurs choses étaient en ma faveur. Les spécialistes croient que ma condition physique m'a donné un grand avantage, pas seulement en aidant à me guérir plus vite mais aussi en évitant des blessures plus graves. Depuis que ma femme est décédée il y a quelques mois, j'ai perdu du poids et je soupçonne qu'avoir eu moins d'élan au moment de l’ouverture du parachute m'a bien aidé aussi. Ma femme s'est toujours occupée de moi et j'ai le sentiment qu'elle continue à le faire.
 
Rétrospectivement, ma préparation pour cet accident a commencé il y a 18 mois. En 2007 à Forbes, j'ai vu un pilote autrichien, Andreas Orgler, avoir un accident très similaire. Bien que dans son cas, il n'ait pas fait la rotation façon « sycomore », il a fait deux tumblings avant d'être séparé de son aile qui a volé vers moi et est passée juste à coté avec une vitesse qui aurait certainement pu me descendre moi aussi. Entretemps, Andreas avait ouvert son parachute rapidement, bien avant d'avoir atteint la vitesse maximale d'une chute libre. Malgré sa vitesse plus faible, le gonflement de son parachute avait été explosif et le parachute s'était cassé. Il a continué à tomber en chute libre juste devant mes yeux.
 
Etre témoin d'un accident tellement traumatisant m'a profondément touché pendant longtemps mais c'était pour moi la raison de m'acheter le dernier harnais de Skyline et un nouveau parachute 'High Energy'. Ces équipements m'ont fait survivre cet événement rare et improbable qu’est la séparation pilote-aile. L'accident de Forbes m'a aidé à me préparer à survivre au mien à Gulgong. Cela peut être une légère consolation pour ceux qui ne m'ont jamais vu, mais qui connaissaient Andreas : il m'a aidé à survivre.
 
Je suis très heureux d'être en vie.
 
Ma façon de voir le vol libre n'a pas changé et je n'ai aucun doute sur la sécurité et les risques de deltaplane. J'espère pouvoir revoler, mais tout cela dépend de mes côtes et si je peux revoler pour quinze nouvelles années, je serai surpris de retrouver l'air que j'ai rencontré lundi dernier. Je n'aurais rien pu faire rien d'autre et aucun équipement ne se serait comporté différemment. L'air m'aurait fait de toute manière basculer en tumbling.
 
Le Rev est l'aile la plus stable et belle que j'aie volé et si je revole, cela sera avec le même matériel.
 
Vérifie ton équipement et mets-le à jour pour avoir le meilleur; ça vaut les 100 Euros en plus !

Adam Parer


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